Tout le monde vous le confirmera « Sur internet, on trouve tout ». Un repas de famille, une question à laquelle personne ne sait répondre ? Hop, on dégaine les téléphones et on se cultive un peu plus. L’information est à portée de clics.

Oui mais… Peut-on réellement considérer les informations du net ? 

Le 7 avril 2015, une grosse bourde du NouvelObs me faisait sortir de mes gonds.

 

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Fausse information relayée dans un vrai journal

Ce matin là, mon ami Matthieu Grass, gérant de nombreux sites internet, voyait le taux de fréquentation de l’un d’eux battre des records. Le site d’informations ZNN, Zapping News Networking, était littéralement saturé. Matthieu en cherche la raison : un lien de redirection vers son site a été fait depuis celui du NouvelObs. Alors où est le problème me direz-vous ?

L’article en question, celui que cite ce journaliste du Nouvelobs, précisant que « 75% des Français utiliseraient le même mot de passe », est totalement bidon. ZNN relate de vraies infos mais en fabrique également de toutes pièces, de fausses informations humoristiques, satiriques, signalées par un logo, un petit « f », pour que le lecteur ne s’y méprenne pas.

Grossière erreur du Nouvelobs

Comment un journaliste en poste au Nouvelobs depuis plus de cinq ans peut-il commettre une erreur pareille ? Comment a-t-il pu copier-coller bêtement le lien d’un article qu’il n’a même pas lu tant la déformation de la vérité est évidente :

« Selon une étude de l’observatoire des pratiques et des risques liés à la sécurité de l’information, le CLUSIF (Club de la Sécurité de l’Information Français), uniquement 2 codes secrets seraient utilisés par l’ensemble des habitants de l’hexagone pour sécuriser les cartes bancaires : « **** » ou « #### ».

Du côté d’internet, le constat n’est pas plus reluisant car 75% de la population Française utiliserait le même mot de passe pour les formulaires sur internet « ****** ». Dans le top 3 des codes confidentiels, nous retrouvons le traditionnel « ******** » et, un peu plus rarement, « ******* ». »

     S’informer en toute confiance sur le net n’est plus aujourd’hui chose facile. Il faut savoir faire un tri et les données circulent tellement rapidement, fausses ou vraies, qu’il faut également faire preuve de bon sens pour ne pas tomber dans les pièges de la radicalisation.

 

La propagation de la haine par la manipulation de l’info

Sur les réseaux sociaux, on « partage », on « aime » et on « re-tweete ». Mais trop peu de gens prennent le temps de vérifier les informations qu’ils relaient. C’est ainsi que l’on voit des articles fleurir sur la toile : « une famille de cinq personnes avec deux parents au RSA gagne 1000€ de plus qu’avec deux parents salariés » ou encore « Les mamans Roms que vous voyez dans la rue droguent leurs enfants pour qu’ils dorment sur leur genoux ». Des articles rédigés et partagés pour propager la haine et le racisme.

Clics et partages de fake news

Des articles qui seront relayés en masse et qui diviseront encore un peu plus les peuples. Il est impressionnant de remarquer que nous pouvons être « tous Charlie » un temps puis de nouveau décimés, partagés en quelques heures à cause de ces slogans, ces montages photo, ces publications anti-religieuses, anti-politiques, anti-tout. Un peu cocasse sur des réseaux-sociaux parlant d’ « amis » et de « relations ». Ces fausses nouvelles partagées, plus souvent désignées désormais par l’anglicisme « fake news« , donnent un sentiment d’appartenance à ceux qui les partagent.

Alors qui fait cela ? De petits malins, cachés derrière leurs écrans et fiers de leurs trouvailles. Difficile souvent de remonter à la source du canular tant les données circulent vite. Peu de signatures, peu de noms, juste des mots et des images qui blessent ceux que cela ne fait pas rire.

 

Faire le buzz à tout prix !

 

 Puisque le nombre de journalistes du net, de rédacteurs, de blogueurs croît à une vitesse folle, il convient pour certains d’entre eux de sortir du lot en « faisant le buzz ».

L’argent par la tromperie et l’invention

Alors comment faire le buzz quand on n’a rien à se mettre sous la dent ? Surenchère de la bêtise : en inventant des informations et en les faisant passer pour vraies. Tant pis si la personne passe des heures à peaufiner son montage vidéo, à trouver les personnages et le scénario de son histoire catastrophe, pourvu que les connexions et donc les rentrées d’argent dues aux publicités hébergées, soient à la hauteur de ses espérances.

Vous trouverez alors de tout, des serpents géants de centaines de mètres de long, des disparitions d’enfants qui ne sont jamais nés… Le top du top en ce moment ? Les classements inventés de toutes pièces.

Les articles listes, une histoire de référencement

Les classements et les top 5 ou top 10 sont le meilleur moyen pour un site internet de partager ses mots clé, et donc d’être bien référencé sur les moteurs de recherche. Un exemple ? « Les quinze prénoms de filles les plus retrouvés dans les asiles », un article qui tourne sur les réseaux sociaux mais dont personne ne sait la provenance.

Tant pis se disent les « grands sites », on relaye et on participe au buzz. Ainsi, Le demotivateur écrit sans honte : « Nous n’avons pas trouvé l’origine de cette liste, ni sur quelle statistique s’est basée cette recherche. Mais en tout cas, on peut dire qu’elle est bien insolite ! ».

Le média MeltyBuzz partage aussi et annonce : « En effet, nous sommes en possession de la liste des prénoms les plus courants des filles que l’on retrouve dans les hôpitaux psychiatriques. Elle a été établie selon les listings d’asiles, et c’est avec une grande précaution que nous vous la communiquons aujourd’hui. »

Autant dire, du grand journalisme d’investigations

Réinformation, la lutte s’organise

 Des sites contre la désinformation existent pourtant pour nous aider à démêler le vrai du faux, mon préféré étant HoaxBuster.com.

Des informaticiens, des passionnés du net et de l’info qui font des recherches impressionnantes et remontent aux sources des articles, des publications, des photographies et des vidéos. Un site que nous devrions tous avoir dans les onglets de notre navigateur.

 

La désinformation au service de l’humour

Il reste une catégorie de site d’informations que je n’ai pas encore approfondie mais que j’approuve : les sites qui manipulent l’information pour faire rire, et qui ne s’en cachent pas.

Et j’en reviens au début de mon article : ZNN est un site résolument bon-enfant, qui relaye de vraies informations, souvent insolites et drôles mais qui en invente aussi beaucoup. Des articles amusants, exagérés, qui peuvent difficilement être pris au sérieux avec des titres éclairants : « La création d’une collection de meubles SM par Ikéa façon 50 nuances de Grey », « Une opération réussie pour enlever la chanson « libéréééée délivrééééé » de nos cerveaux », « L’adhésion de DSK aux Menen »…

D’autres sites du même esprit existent comme le célèbre Le Gorafi, Bilboquet magazine ou encore la Désencyclopédie. Leur but est simplement de divertir les lecteurs sans aucune prétention de vérité. Des sites que de nombreux utilisateurs des réseaux sociaux voudraient modérer et interdire, prétextant une désinformation dangereuse. Pourtant, avec un peu de bon sens, un brin d’observation et aussi de culture, on parvient toujours à démêler le vrai du faux.

 

Choisir la vérité ou la rentabilité ?

A la guerre comme à la guerre. Plus besoin donc de faire des études de journalisme ou de sociologie pour publier des informations. Plus besoin de réaliser des enquêtes de terrain et des investigations poussées, on publie sans fondement, parce que la vérité est moins rentable. Et oui, encore une fois, tout est une question d’argent. Un journaliste vous demandera plusieurs heures de recherche pour un article tandis qu’un rédacteur peu scrupuleux rédigera le texte qu’il vous faut en moins d’une heure.

C’est pour toutes ces raisons que l’on retrouve chaque jour des tonnes d’articles faux, inventés, mal sourcés ou détournés. Les propriétaires de ces sites se rémunèrent grâce à la fréquentation de leurs pages et aux nombres de vues de leurs bannières publicitaires.

 

Pour finir, je vous raconterai que lors d’un entretien en début d’année, un journal local (Vosgesmachin*) m’a proposé de travailler avec eux pour 0.03 € la ligne. Ils ont même ajouté « Ah mais ce sera 1,22 € la photographie quand même ! ». Wahou !

A ce prix là, il est bien normal qu’inventer des informations soit bien plus rentable que de sortir de chez soi pour faire une enquête ou un reportage…